« En tant qu’élus avec un pouvoir législatif, nous avons le pouvoir de protéger la primauté du droits et les droits de l’homme. Aujourd’hui, nous nous engageons à continuer à utiliser notre position afin de faire pression pour l’abolition de la peine de mort, avec nos gouvernements ainsi qu’avec les organisations régionales et internationales. »
Mme Kasthuri Patto, parlementaire (Malaisie),
au nom des parlementaires et de l’Action mondiale des parlementaires –
23 juin 2016, Oslo, cérémonie de clôture
du 6e Congrès mondial contre la peine de mort

Afin de créer un environnement propice à l’abolition de la peine de mort, il est important pour le mouvement abolitionniste de développer des stratégies de plaidoyer solides afin d’atteindre les parlementaires et l’exécutif. L’objectif de cet atelier était d’échanger des outils et des bonnes pratiques sur le plaidoyer en faveur de l’abolition au niveau national, avec ces acteurs clés.
Le plaidoyer auprès des parlementaires et de l’exécutif n’est pas un exercice facile. Dans un cas comme dans l’autre, l’objectif essentiel est de pouvoir atteindre les parlementaires ou l’exécutif afin de plaider pour l’abolition de la peine de mort et obtenir le soutien de ces deux acteurs clés de l’abolition de la peine capitale dans les pays rétentionnistes.
Ce dialogue doit être mené de manière réaliste, en faisant des demandes approchant l’abolition, étape par étape. Par exemple, une première approche peut être d’abolir la peine de mort obligatoire pour les pays la pratiquant, de réduire le champ d’application de la peine capitale ou encore de plaider pour la signature du moratoire sur les exécutions.

Plaider auprès de l’exécutif

En décembre 2015, la Mongolie adopte un nouveau Code pénal abolissant la peine capitale. Cette abolition est en partie due au plaidoyer mené auprès de l’exécutif par Amnesty International Mongolie. La méthode utilisée a été de mener une stratégie de plaidoyer sur trois fronts complémentaires99 :
• Auprès des autorités mongoles, en identifiant les personnalités pertinentes du gouvernement telles que les ministres de la Justice et des Affaires étrangères, le Président et son équipe, ainsi que les membres du groupe de travail sur les réformes pénales.
• En sensibilisant différents acteurs (les avocats, les professeurs et étudiants en droit, la société civile et le public mongol), notamment en formant les avocats et les médias sur la question de la peine de mort et des traités internationaux ;
• En mobilisant les ressources nécessaires afin de renforcer le plaidoyer mené auprès des autorités mongoles. En l’espèce, des réunions avec le Président, des actions publiques (films, expositions) menées en invitant le Président et la mobilisation de parlementaires et d’ambassadeurs de l’Union européenne invités à utiliser leurs réseaux afin de faire pression sur l’exécutif mongol.

Le rôle des parlementaires est un atout pour le plaidoyer auprès de l’exécutif comme pour le plaidoyer auprès des parlementaires eux-mêmes. Le plaidoyer auprès des parlementaires peut notamment être mené de deux manières : le plaidoyer de parlementaire à parlementaire (peer to peer) et la création de réseaux de parlementaires.

Plaider auprès des parlementaires en utilisant la méthodologie « peer to peer »100.

La technique de plaidoyer peer to peer, ou plaidoyer « par les pairs », permet de créer un engagement de parlementaires, indépendamment de leur appartenance politique, vis-à-vis des parties intéressées, afin qu’elles comprennent les idées reçues sur la peine de mort et son inefficacité en termes de justice et d’effet dissuasif. Cette technique est largement utilisée notamment par l’Action mondiale des parlementaires (PGA).
À titre d’illustration, en Malaisie, PGA a organisé deux consultations parlementaires en 2015, au cours desquels trois ministres, dont les ministres de la Justice et du Tourisme, se sont engagés publiquement à abolir la peine de mort obligatoire pour les crimes relatifs à la drogue et à introduire des réformes légales en ce sens.
Une autre méthode de plaidoyer auprès des parlementaires est la création de réseaux de parlementaires, tel que celui initié au Maroc par ECPM101. Grâce au travail de la société civile marocaine, en particulier la Coalition marocaine contre la peine de mort, en partenariat avec ECPM, le réseau des parlementaires marocains contre la peine de mort102 a été créé au sein du Parlement marocain, rassemblant 250 parlementaires issus de la Chambre des représentants et de la Chambre des conseillers, de tous les partis politiques, à l’exception du parti actuellement au pouvoir, le Parti de la justice et du développement. Après le succès de la création de ce réseau et de la mobilisation des parlementaires, qui a permis de remettre l’abolition de la peine de mort au cœur des débats parlementaires, ECPM a lancé plusieurs initiatives similaires dans d’autres pays, comme le Liban, la Tunisie et la République démocratique du Congo103.

 

Notes


Pour aller plus loin


Mise en place d’un réseau de parlementaires nationaux contre la peine de mort